top of page

Claymore : Un cercle de vengeance

Claymore est un anime impitoyable dont les thèmes ne sont pas forcément évidents au premier abord, tant l’anime privilégie son histoire. Cependant ceux-ci méritent qu’on s’y attarde, car ils sont traités de façon crûe, voir cruelle, tout au long des 26 épisodes.

Remettons-nous dans le bain :

Dans un monde médiéval fantastique, les Hommes sont les proies des « malebête », des créatures qui se cachent parmi les humains pour les dévorer. Seul rempart contre ces monstres qui possèdent des facultés extraordinaires grâce à la « maleforce » : les Claymores. Des guerrières mi-humaines mi-malebêtes, qui peuvent utiliser la « maleforce » pour détecter et combattre les « malebêtes ». Détestées et craintes par les humains pour leur côté malebête, nous suivons Claire, une Claymore qui sauve un jour un jeune garçon du nom de Raki. Rejeté par son village, il décide de suivre Claire dans ses missions.

L’anime est donc une aventure héroïque fantastique sombre. Découpé en 6 arcs, Claymore propose une avancée graduelle. Les ennemis et les protagonistes sont de plus en plus forts, à mesure que les révélations tombent et que de nouveaux problèmes apparaissent pour Claire et ses comparses. L’anime se montre assez cruel sur de nombreux points : "l’organisation" responsable et productrice des Claymores, ne les considères pas plus que de la chair à canon ; les Claymores qui dépassent la limite de leur « maleforce » subissent « l’éveil » et deviennent des « malebêtes » éliminées par leurs camarades ; les passés des personnages sont terribles et empreints de souffrances… mais certains détails amènent des thèmes inattendus ou accentuent le fond de l’histoire.

La sexualité homme/femme

Un thème assez étonant qui survient tôt dans l’anime, puisque le plaisir sexuel est évoqué dès l’arc 2, lors de « l’éveil » de Priscilla. Il revient dans l’arc 3 où il est expliqué. Claire est envoyé avec 3 camarades : Miria, Denève et Héllène, combattre un « affamé », une « malebête » plus redoutable que les autres. Lors de ce combat on apprend plusieurs choses : d’abord que les Claymores n'étaient avant que des guérriers hommes, mais que ceux-ci dépassaient leurs limites trop vite et devenaient des « malebêtes ». les claymores sont dorénavant des femmes qui résistent mieux à « l’éveil ». Ensuite que « l’éveil » comme suggéré avant, se révèle proche du plaisir sexuel. En allant au bout de l'image, on peut y voir une façon de dire que l'appétit sexuel des hommes est plus violent et incontrôlé que celui des femmes, mais surtout, que celui-ci pousse lorsqu'il n'est plus temporisé échappe à toute mesure et conduit les hommes à devenir des menaces pour tout le monde.

A partir de là, un autre parallèle devient possible : avec d’un côté les « éveillés » et les malebêtes, qui ont cédés à leurs pulsions et sont devenu des monstres insatiables et de l’autre, les Claymores, des femmes qui n’ont pas encore connu « l’éveil », chargées de supprimer les premiers. Jusque-là rien de passionnant, mais un autre détail ajoute un intérêt à cette comparaison : les éveillés en savent plus que les Claymores sur leurs propres limites comme sur leurs puissances et se sont libérer des règles de « l’organisation ». Les Claymores sont soumises à « l’organisation » qui leur cache des choses et leur bourre le crâne de règles ; Priscilla, une novice qui applique les procédures sans se poser de questions presque de manière obsessionnelle, en est un bon exemple. Un décalage existe entre les guerrières : les claymores non éveillées jugent les novices immatures et inexpérimentées. Mais un autre décalage apparaît entre les « éveillés » et les Calymores. Peut-on comprendre que les guerrières représentent des femmes naïves, immatures, à qui on cache la sexualité pour les garder docile ? Ou bien, peut-on voir avec les « éveillés » une métaphore de la sexualité non contrôlée qui fait du mal aux autres ? La sexualité devient dés lors un objet de connaissance qui permet le contrôle. Je serai bien en peine de donner une réponse, mais l’anime permet de se poser ces questions, il aurait été dommage de passer à côté.

Claymore et Shakespeare

Un détail cette fois, qu’il aurait aussi été dommage de manqué : le personnage d’Ophélie. Evoquée dans l’arc 3 et ayant l’arc 4 rien que pour elle, de nombreux éléments font d’Ophélie un personnage à part et intrigant. Redoutée par ses camarades, Claire est mise en garde par Miria de ne pas l’approcher. Et de fait, Ophélie est dangereuse. Puissante, car elle est la numéro 4 de « l’organisation », elle est obsédée par la chasse à « l’éveillé », ne se gêne pas pour bafouer les règles des guerrières : ne pas tuer d’humains, ni pour s’attaquer à ses camarades. Elle est aussi un personnage imprévisible, mentalement déséquilibré et un brin sadique.

Mais tout au long de l’arc 4 Ophélie au-delà de son nom, semble de plus en plus inspiré de son homonyme, dans la pièce Hamlet de William Shakespeare. Faisons une comparaison : Dans Hamlet, Ophélie, sœur de Laërte, devient folle et meurt dans une rivière où elle se noie. Dans Claymore, Ophélie perd son frère, dévoré par une « malebête », a l’esprit pour le moins dérangé et meurt en combattant Claire, dans un lac. Je ne suis pas pour toujours comparer ce qui existe avec les œuvres classiques (on ne pourrait plus rien inventer), mais là, l’anime laisse peu de doutes. On voit mal pourtant le lien entre Claymore et Hamlet, si ce n’est le thème principal : la vengeance.

© Claymore animé épisode 13

Une spirale de vengeance

Car le thème de fond de Claymore est bien la vengeance. On peut supposer que la folie meurtrière d’Ophélie contre les « éveillés » est motivé par le désir de vengé son frère ; Priscilla veut venger son père tué par les « malebêtes » ; plus tard dans le 6ème arc, Denève voudra venger sa camarade Ondine ; sans oublier Claire, devenu une Claymore pour venger sa mentore Thérèse… (en plus de ceux que j’ai certainement oublié). Bref, le désir de vengeance est présent tout au long de l’anime ainsi que dans la motivation de nombreux personnages.

Les personnages sont donc enfermés dans une spirale de vengeance sans fin, qui rend leur lutte vaine. Le désir de vengeance apparait dans l’anime comme le véritable fléau et ce qui rapproche les Claymores des « malebêtes ». Lors du combat final, Claire est sur le point de tuer Priscilla et de « s’éveiller », mais Raki intervient, rappelant que Priscilla a vécu la même chose que Claire en perdant un être cher. Un point intéressant : Priscilla est alors en apparence humaine et Claire, envahit par l’envie de se venger à une apparence de monstre. C’est l’intervention de Raki contre cette vengeance, (entre autre), qui permet à Claire de rester humaine et de briser le cercle décrit plus haut.  

Enfin

Claymore aurait pu n’être qu’une simple histoire, avec ses combats, ses moments touchants et ses personnages aux caractères bien trempés, mais tous ces détails en font quelque chose de plus, où on peut trouver des pistes de réflexions et une certaine profondeur.

Pour ceux qui souhaite aller plus loin, sachez que l’anime a été fait pendant la sortie du manga et a inventé une fin qui n’existait pas. Le manga compte lui, 27 tomes et l’histoire va bien plus loin en apportant des révélations et des réponses laissées en suspend dans l’anime. On pourra par exemple déplorer que l’anime ne se penche absolument pas sur les motivations de « l’organisation », ni sur l’origine des « Abyssaux », ni sur le passé de certaines guerrières, comme Raphaëlle.

Mais Claymore reste un anime puissant, par ses combats, ses personnages, et son histoire. Les amateurs d’héroïque fantastique y trouveront leur compte avec le petit plus de cruauté de la dark fantasy.

© Madhouse Studio

Layer Hadrien  01/2020

bottom of page