Darling in the Franxx : Un conte magnifique
« Les « Phis » sont des oiseaux qui n’ont qu’une seule aile, pour voler, ils doivent se serrer contre un partenaire. » Draling in the Franxx ouvre sur ce joli conte qui nous annonce dés les premières secondes, le fond de son histoire. En effet l’animé commence ainsi :
Dans le futur de notre monde, les humains sont regroupés dans d’immense villes mobiles, appelés les « plantations » et ne cessent d’extraire le « magma », la ressource devenue la plus importante de la planète. Seulement l’extraction attire les « Koryu », des monstres mi-bêtes mi-machine, qui s’attaquent aux villes. Pour se défendre, les humains ont crée de gigantesques armes : les Franxx, des robots qui ne peuvent être pilotés que par deux partenaires de sex différents. Hiro, jeune garçon de la plantation 13, est un pilote... Mais ne parvenant pas à se synchroniser avec sa partenaire, il est sur le point d’être mis au banc. C’est alors qu’arrive Zero-two, une pilote légendaire avec laquelle Hiro parvient à se synchroniser. Le jeune garçon est déterminé à devenir son partenaire, mais ses équipiers ne sont pas rassurés lorsqu’ils apprennent que les partenaires de Zero-two meurent tous prématurément...
De thématiques ont peut en ressortir trois principales que l’animé explore avec brio en soulevant plusieurs questions qui ne manquent pas de profondeurs. La première d’entre elles, et non la moindre, est celle de l’immortalité.
L’immortalité
Dans Darling in the Franxx, les humains ont découvert le secret de l’immortalité. Si la révélation apparaît vers la fin de l’animé, car elle explique la totalité du background, elle détermine tout le sous-texte.
On apprend pour commencer, que petit à petit, les humains qui en avaient les moyens sont devenus immortels, tandis que les autres ont lentement disparus. Ici, on peut déjà noter une brève critique sur les inégalités de ressources, mais ce que veut raconter l’animé, c’est surtout les conséquences de cette immortalité.
Et la première, est que la procréation est devenue... impossible et inutile. Le Magma qui rend les humains immortels les rend aussi stérile, mais de plus, si les humains ne meurt plus, il n’est pas nécessaire de renouveler les générations. C’est même destructeur d’augmenter la population si on veut que tous ai des ressources. Cependant les humains se retrouvent piéger, lorsqu’ils s’apperçoivent que la technologie utilisée pour construire les Franxx, ne peut s’activer qu’avec deux partenaires de sex opposé. Pour rester immortels, les humains doivent donner la vie artificiellement. On touche ici à une dystopie comme Le meilleur des mondes : les « enfants » qui servent de pilotes aux Franxx, sont mis au monde artificiellement. Et surtout... Ils sont mortels. Pire, lorsque l’animé commencera à faire comprendre que les « enfants », c’est-à-dire les pilotes, n’ont pas une espérance de vie élevée en raison de la dangerosité de leur mission, il est insinué que ceux-ci sont destinés à mourir pour leur mission. Une révélation plutôt violente, qui montre tous le mépris des immortels envers ceux qui sont là pour les protéger... De leur vie. Les pilotes ne sont vu que comme des outils remplaçables.
© Kyoto Animation
Mais le point le plus important abordé par l’animé est ce qu’implique cette immortalité. Là, deux parallèles sont traités :
D’abord, cette immortalité qui engendre une stérilité montre un choix : celui de garder sa vie, plutôt que d’en donner une. Ici le parallèle est directement fait avec les « enfants » avec lesquels l’animé (on le verra en dessous) traite de la complémentarité garçon/fille, de leurs différences, mais aussi du soin porter à son partenaire et de ce qu’on peut construire avec lui/elle. Dans l’épisode 10, on découvre un couple d’immortels, dont le mari, vie enfermer dans une simulation, au lieu de passer ses vieux jours avec sa femme. En choisissant sa vie, son bonheur, jusqu’à s’enfermer dans une simulation, l’animé montre que ce choix est égoïste et paradoxalement, en faisant des immortels des être ignorants, chétifs et maladifs, l’immortalité semble avoir affaiblis l’humanité.
Le second parallèle, concerne le fond de l’histoire. Les humains sont devenus immortels... Sur une terre aride, desséchée et dont les ressources semblent épuisées (sauf le magma). Dans les derniers épisodes, lorsque les humains tenteront de faire pousser des récoltes afin de recréer une société, ces récoltes mourront. Un aspect de l’épuisement des ressources est alors abordés : la terre en veut aux Hommes. Symbolisée par la princesse des Koryu, la terre est traitée comme un personnage, les humains l’ont exploités sans pitié et celle-ci se venge. Il faudra que la terre pardonne avant que la nature ne réapparaisse.
La question de l’immortalité s’étend donc tout au long de l’animé, mais le spectateur n’en a conscience qu’à la fin, lorsque celle-ci est amenée sur le devant de la scène. Un traitement tout en subtilité qui permet de revisionner l’animé avec une seconde lecture. On s’aperçoit que l’immortalité a affaibli les humains, tout comme l’extraction du magma (qui permet cette immortalité) a épuisé la terre et ses ressources.
Adultes enfants
La deuxième thématique importante de l’animé est que celui-ci joue a renverser la relation adulte/enfant. Dans cette société futuriste, une hiérarchie très stricte encadre les « enfants » et les « adultes ». Les premiers, sont les pilotes des Franxx, ils affrontent les Koryu pour protéger les villes et dans une logique militaire sont aux ordres de supérieurs (les adultes). Ils vivent dans des lieux à l’écart de la ville et n’ont pas le droit d’y entré ou d’avoir de contact avec les « adultes » en dehors des cérémonies officielles. L’ensemble des villes des humains est dirigé par un conseil de sage, dont le chef est connu sous le nom de « papa ».
© Darling in the Franxx épisode 1
Jusqu’ici, on ne voit qu’une organisation comme une autre dans une société dystopique. Les « enfants » arrivés à un certain âge et après certains faits d’arme, caressent le rêve d’être récompensés par « papa » en devenant des « adultes », dont ils fantasment l’existence dans les villes. Car pendant un long moment, on ne sait rien des « adultes » et de la vie dans les villes. Ceci est représenté par le personnage de Zorome qui voue une admiration sans borne à « papa », idéalise les « adultes » et dont la plus grande aspiration est d’en devenir un. Ici l’animé donne aux personnages les attributs de l’enfance : ceux-ci sont maintenu à l’écart, dans une ignorance totale. Ils vivent pour ainsi dire dans un autre monde. Dans leur « caserne » les enfants suivent un quotidien défini, se lève à telle heure, mangent à telle heure, font une prière à « papa » qu’ils répètent comme ont leur a apprit, tandis que le ménage, la cuisine et la lessive sont fait sans qu’ils ne voient jamais qui sont les personnes qui entretiennent leur lieu de vie... On peut dire que ceci représente le monde de l’enfance. L’enfant qui loin des préoccupation des adultes, est encore ignorant du monde, des tâches ménagères, admire ses parents, idéalise les adultes et fait ce qu’on lui dit sans le remettre en question.
© Darling in the Franxx épisode 16
Cette remise en question, l’animé la fera intervenir petit à petit. D’abord, dans l’épisode (), Zorome, se perdra dans la ville lors d’une visite exceptionnelle. On découvrira en même temps que lui, le monde des adultes, qui n’est pas si merveilleux. Mais surtout, Zorome découvrira avec amertume que loin d’être reconnaissant, les « adultes » les méprisent. « Arrête il me fait pitié » dira un garde venu récupérer le jeune garçon. A partir de là, l’utopie de Zorome commencera à s’écrouler.
Ensuite, à partir de l’épisode (), lorsque la ville sera détruite et les « enfants » livrés à eux-même, ceux-ci s’organiseront en attendant les secours. Mais le temps passe et « papa » en qui ils ont une foi aveugle, ne vient pas les sauvé.
Dans ces épisodes, on peut pensé que l’animé nous montre la désillusion de l’enfant qui grandit et qui se rend compte de la dureté de la vie. D’abord, parce que le petit groupe va prendre en charge les tâches ménagères, la cuisine, l’entretien du bâtiment, organiser entre eux leur quotidien. La nécessité, les rend indépendant. Ensuite, parce que le groupe « d’enfant » attend un secours des adultes qui ne vient pas. Convaincu qu’on ne va pas les laisser comme ça, les héros sont confiants et enthousiastes. Mais au bout d’un moment, les inquiétudes éclatent et ceux-ci se désespèrent d’être sauvé.
Encore une fois, c’est Zorome qui représente cet état de l’enfant qui devient conscient. Il est le plus confiant du groupe, ne cessant de répéter que « papa » va venir, qu’il ne va pas les laissé comme ça etc... Mais au fur et à mesure, on voit Zorome dans l’incompréhension de l’absence de « papa » et des « adultes », cette incompréhension se mûe en colère d’autant plus terrible que le garçon se sent trahit. Lors du repas où tous exposeront leurs angoisses, c’est Zorome qui ouvre le bal en refusant de faire la prière pour « papa » « on peut s’en passé, c’est nous qui avons tout fait ! » dira-t-il.
Jusqu’ici, l’animé prend son temps pour montrer brillamment à travers ses personnages l’évolution des enfants. Mais plus que ça, l’animé renverse la relation enfants/adultes. Dans Darling in the Franxx, les « enfants » protègent les villes où vivent des adultes, qui les méprisent et sont ignorants de leur combat... De plus, les « enfants » sont maintenu dans un « culte » béat des adultes et de « papa ». Pourtant, n’est-ce pas le rôle des adultes, et particulièrement des parents, de protéger, les enfants et de leur faire découvrir le monde pour les accompagné vers l’indépendance ?
L’animé renverse avec brio les responsabilités et crée un étrange paradoxe en faisant de ces héros des « enfants » bien plus dans la réalité que les adultes. Mais Darling in the Franxx ne propose pas qu’une réflexion sur les relations parent/enfant.
La complémentarité garçons/filles
Dans l’épisode 8 l’équipe affronte un kyoryu qui meurt en explosant et en répandant un liquide sur les Franxx. Ce liquide s’infiltre dans les cockpits, tombe sur les filles, faisant fondre leurs combinaisons... A partir de là, les filles seront furieuses, accusant leurs partenaires de les avoir « mater », tandis que les garçons, le reconnaitront tout en ne voyant pas en quoi c’est si grave, ce qui conduira les filles à découper leur centre en deux parties et à refuser tout contact avec les garçons. L’épisode, un peu cartoonesque et ecchi, il faut le reconnaitre, sert un des propos majeur de l’animé. Celui de la complémentarité garçon/fille.
Si les partenaires pilotes ne peuvent être que de sexe différent, et si la position des deux pilotes dans le Franxx est hautement suggestive, cela n’est pas purement pour faire fantasmer les spectateurs. Dans cet épisode, est abordé la confiance qui est accordé à l’autre sexe et la vision du corps que les partenaires ont du leur et de celui de l’autre.
© Darling in the Franxx épisode 8
Ce n’est pas tant qu’ils aient vu leurs corps que les filles reprochent aux garçons, que le reproche d’avoir profiter de la situation pour « mater ». Les garçon en considérant que les filles dramatisent, ne comprennent pas le sentiment de vulnérabilité des filles qui comme le dit Mitsuru « ce sont leurs corps frêles qui combattent et qui reçoivent les coups pendant que nous nous pilotons ». La colère des filles vient plus du fait que leurs partenaires aient regarder leurs corps pendant qu’elles étaient vulnérables. Miku, qui refusera catégoriquement d’accorder tout pardon aux garçons représentera cette peur du combat à la fin de l’épisode, en découvrant la chambre d’ex-pilotes décédés, la jeune fille s’effondrera en se demandant si le même sort les attends. L’animé met le doigt sur une colère qui nait du fait que la partenaire se sent trahit, par un partenaire qui « profite », au lieu de lui fournir soutien et protection.
© Darling in the Franxx épisode 8
Mais la complémentarité vient de la bouche de Kokoro. Encline à pardonner, elle suit le groupe des filles, afin de rester solidaire. Cependant que ses camarades coupent en deux leur habitat ce qui rend la vie difficile pour tout le monde, Kokoro tente de faire réaliser à ses amies qu’elles cohabitent avec les garçons et que ce qu’elles ne parviennent pas à faire seules, elles y arrivent grâce aux garçons.
L’anime entier est construit sur cette idée de la complémentarité des sexes. Dans sont vocabulaire : les pilotes sont nommées des pistils et des étamines, du noms des organes reproducteurs mâles et femelles des plantes. Mais surtout dans le fait que les Franxx ne fonctionnent qu’avec des pilotes de sexes différents. Dans l’épisode ... Lorsque Ikuno tente de faire équipe avec Ichigo, cela ne marche pas, elles ne parviennent pas à se synchroniser. Plus tard, on apprendra que Ikuno est amoureuse de Ichigo et qu’elle en veut aux garçons « de pouvoir être près d’elle ». Ce couple potentielle contraste ici avec Kokoro et Mitsuru qui seront le premier couple au sens propre et le couple à donner pour la première fois la vie par amour depuis que les humains sont immortels et comme ne peuvent donner la vie qu’artificiellement pour des fins utilitaires.
Le propos de l’animé n’est pas l’attirance sexuel, mais de faire un parallèle avec la terre. Ikuno et Ichigo étant deux filles formeraient un couple stérile, comme les humains devenus immortels, la complémentarité garçons/filles est donc vue comme le départ de la vie. La terre, épuisée par l’exploitation des ressources, reviendra à la vie, comme l’humanité qui devenu stérile, prendra un nouveau départ grâce aux générations que créerons les partenaires des Franxx.
Quant à l’épisode du « matage » on passera sur le fait que les garçons aient vu un liquide corrosif couler sur leur partenaire et aient préféré mater plutôt que de les aider et on passera aussi sur le fait que les filles : un, soient inquiètes d’avoir été vu nue, et pas qu’un liquide corrosif leur soit tombé dessus et deux, se disent fâchées contre les garçons parce qu’ils ont mater et pas parce qu’ils ne les ont pas aidé...
Finalement
On aurait pu parler de bien d’autres aspects qu’aborde l’animé, Darling in the Franxx est un conte très complet, qui raconte comment l’humanité après s’être enfermée dans son égoisme, réapprend à aimer ses semblables et ce que leur donne la terre. La beauté de l’animé est sans conteste toute la tendresse et la bienveillance que les héros se portent entre eux. Un chef d’œuvre sans complaisance, tout en simplicité dans une histoire palpitante.
Layer Hadrien 11/2021